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Tribune : 2 mois de SMICs se payer une place à l'université ?

Dernière mise à jour : 24 oct.

 Deux SMICs pour s’inscrire à l’université : Le spectre de l’augmentation des frais d’inscription à l’université est le dernier coup de massue contre l’université publique. Retrouvez ma tribune sur Le Nouvel Obs !


C’est une rumeur épouvantable qui se propage depuis de nombreuses années dans les universités : bientôt les frais d’inscription vont augmenter. Tout bon observateur aura relevé plusieurs indices. Premièrement, tout a été mis en place pour satisfaire les gouvernants néolibéraux friands de marchandisation du savoir ces dernières années : sélection à l’université par Parcoursup, puis Mon master ; augmentation des frais d’inscription pour les étudiants étrangers, souvent les premiers à expérimenter les mesures les plus autoritaires du gouvernement ; et, en parallèle, le dépérissement de l’enseignement supérieur tout entier, jusqu’au dernier budget qui entérine une baisse inédite de 1,5 milliard d’euros de crédits en prenant en compte l’inflation. Deuxièmement, les universités publiques sont en crise : trois quarts d’entre elles ont voté un budget en déficit, du fait des mesures gouvernementales non compensées et des restrictions budgétaires imposées. Le nombre de vacataires, précaires de l’enseignement supérieur et la recherche (ESR), explose dans des universités ne pouvant plus embaucher ni titulariser. Troisièmement, sur les ruines de l’université publique prospère l’enseignement supérieur privé, gavé de subventions à l’apprentissage. Ce qu’Emmanuel Macron a offert gracieusement aux entreprises et au privé pour faire des étudiants une main-d’œuvre bon marché et qui rapporte. Les étudiants sont ainsi transformés en chair à canon obsolescente et pas chère du capital, qui n’en demandait pas tant.


Si ces attaques dirigées contre l’université publique mettent à tout le moins la puce à l’oreille quant à l’augmentation des frais d’inscription, c’est assurément l’explosion du lucratif qui confirme définitivement le sombre avenir qui se profile pour la jeunesse. En effet, l’enseignement supérieur privé à but lucratif est un marché florissant, un écran de fumée derrière le chaos organisé, qui fait bondir le coût du savoir. Certaines formations proposent des frais d’inscription à 10 000 euros l’année tout en trompant volontairement les étudiants sur la validité du diplôme qu’elles confèrent.


D’une rumeur au projet


La rumeur prend corps dans un rapport de l’IGESR (Inspection Générale de l’Education, du Sport et de la Recherche) sorti il y a quelques semaines. Il préconise d’augmenter les frais d’inscription pour les établissements publics à 2 850 euros par an en licence et 3 879 euros en master. Les mêmes tarifs que ceux pratiqués pour les étudiants étrangers et imposés de force, il y a quelques années, malgré une forte mobilisation dans les universités. Le plan « Bienvenue en France » (sic) était peut-être finalement bien nommé, puisque les étudiants extracommunautaires auront été les premiers à expérimenter ce qui attend l’ensemble de leurs camarades.


France Universités aborde le sujet de façon franche et directe désormais. Jusqu’alors inavouable, honteux, le projet est bel et bien dans les tuyaux. Tel un champignon sur du bois mort, l’augmentation des frais d’inscription prolifère sur le dos d’un service public déjà en décomposition. Les étudiants auraient donc deux choix : payer pour entrer dans une université publique en ruine et surchargée, méprisée par les gouvernements dont les membres n’y ont pas fait leurs classes, ou payer (encore) pour entrer dans le privé, allègrement financé par un Etat complice de ce démantèlement. Certains feront le choix du privé lucratif, sans toujours avoir tous les codes ni toutes les informations, tant la frontière avec le privé non lucratif est fine et tend à l’être davantage par les fausses tentatives de « régulation » du ministre démissionnaire Philippe Baptiste.


Arnaud Saint-Martin


Retrouvez ma tribune complète sur le site du Nouvel Obs !




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